Une définition est donnée par le Christ dans l'Evangile de Jean: "Or, la vie éternelle, cest quils te connaissent, toi, le seul vrai Dieu, et celui que tu as envoyé, Jésus-Christ" (Jean 17,3). Mais souvent, avec les Evangiles, une interprétation s'impose. Qu'est ce que connaître ? Dans l'univers biblique les mots n'ont pas toujours le même sens que dans la vie ordinaire. Ainsi lorsque nous lisons : "Adam connut Eve, sa femme; elle conçut, et enfanta Caïn" (Genèse 4,1) - la connaissance dont il est question est une expérience vécue, elle implique un goût et une saveur particulière. Il en est de même dans l'épisode du péché originel : goûter le fruit de l'arbre de la connaissance du bien et du mal, c'est en faire l'expérience ! C'est l'histoire de l'humanité, notre parcours terrestre dans l'espace-temps du péché. Alors faire l'expérience de la vie éternelle, c'est évidemment difficile pour nous de le comprendre maintenant. Tout au plus peut-on imaginer un bonheur immense, une joie et une énergie débordantes. Cela rejoint dès à présent la rencontre avec ce que Jésus appelle : "le royaume" - dont il nous dit qu'il est "à l'intérieur et à l'extérieur de nous" ; autrement dit un état d'esprit, une façon d'être et de regarder la vie et les autres, mais pas seulement. Nous aurons l'occasion d'y revenir.
Envisager la vie éternelle, c'est peut-être en premier un voyage vers l'éternelle jeunesse, une découverte permanente. La jeunesse est curieuse, elle pose beaucoup de questions, elle a soif d'apprendre, elle va de l'avant. Elle ne se satisfait pas de la routine, des habitudes, d'un monde fermé et replié sur lui-même. Elle souhaite découvrir le vaste monde et tout l'univers. Elle est dotée d'une ouverture d'esprit qui lui permet de se tourner vers l'extérieur. Elle est attentive, à l'écoute. Vieillir n'est pas seulement une question d'artères. Si le coeur reste jeune, la vie demeure une aventure.
Réfléchir sur la vie éternelle en 2011, c'est aussi y songer avec les connaissances de notre époque. On voit loin aujourd'hui. Depuis Galilée la terre n'est plus plate et le centre du monde. Les clichés en provenance de l'espace nous montrent une belle planète bleue flottant parmi un océan d'étoiles et de galaxies qui dépassent en nombre tout ce que l'on peut imaginer. Vivre éternellement, ne serait-ce pas pouvoir prendre le temps de découvrir ce que l'on ne connaît pas ? La foi chrétienne me permet de croire en un Dieu généreux et créateur, alors j'imagine que nous ne sommes pas seuls dans l'univers. Et peut-être, si la conscience existe ailleurs, dans l'infinité des mondes semés par la main du Père céleste, le Christ est-il venu aussi apporter son message de paix et d'espoir à d'autres êtres capables de comprendre la différence entre le bien et le mal ?
En l'état actuel des connaissances, il nous est impossible de vérifier tout cela. Et à supposer qu'un jour la technologie nous permette de sortir des limites de notre système solaire pour voyager au-delà, se poserait la question du temps. Nous savons depuis Einstein que celui-ci est relatif, qu'il est une dimension supplémentaire ajoutée à la notion d'espace. Autrement dit, le temps du voyage dans la fusée ne serait plus identique à celui qui se déroule sur terre, donc problème de synchronisation ! Tout se complique.
Ces mondes possibles, ces vies supposées ailleurs, l'être humain peut-il les entrevoir autrement que par le rêve ou l'imagination ? Il nous faut rester sur des points d'interrogation.
Le numéro d'avril 2008 du Gallican avait consacré un dossier aux fameuses EMI, c'est à dire aux expériences aux frontières de la mort vécues par des personnes en état de mort clinique. Parmi les témoignages rapportés par les médecins sur le sujet (voir site internet http://iands-france.org.pagesperso-orange.fr/FRAMES/frame.html) il est possible de relever :
1) Que la conscience de la personne subsiste alors même que son cerveau n'est parfois plus en état de fonctionner.
Remarque intéressante, à relier avec les affirmations des religions sur la notion d'âme, de corps de lumière, d'esprit. Or dans la vie de tous les jours notre état de conscience est étroitement lié au bon fonctionnement de notre cerveau. Là on évolue vers un terrain inconnu...
2) Que cette même conscience peut voir par transparence à travers les objets, voir en même temps de plusieurs points à la fois, voir le film de sa vie en une fraction de seconde, voir des évènements passés ou à venir, percevoir les pensées et les émotions des autres, ressentir la charge émotionnelle d'une situation vécue selon différents points de vue, en fonction des témoins et des acteurs, du pour et du contre, etc.
Dans les expériences d'EMI nous retrouvons l'accès à un savoir universel, le sentiment de comprendre tout l'univers et tout ce qui existe, comme par une sorte de "science infuse". Le témoignage suivant, trouvé sur le site http://iands-france.org.pagesperso-orange.fr/FRAMES/frame.html est édifiant à ce sujet. On y découvre même une sorte "d'identification" à tout ce qui existe. Lisons-le pour comprendre :
- "Il y a eu une forêt. J'ai d'abord eu une vue panoramique de la forêt, puis ensuite cette impression "d'entrer" dans le détail des arbres, jusqu'à la cellule, cette impression d'arriver à l'intimité de l'arbre. C'est plus que visuel, c'est une impression de.. personnification. Ça ne s'est pas passé que pour les arbres, mais aussi pour les rochers, pour une simple vitrine de magasin. C'est assez curieux, c'est une impression de comprendre la matière, l'impression d'être les deux à la fois, moi même et l'arbre, les rochers. Par exemple, quand j'étais l'arbre, j'avais la notion qu'autour de moi il y avait des espèces hostiles. Le problème, sur le moment, c'est qu'on a une espèce de connaissance totale. Tout semble évident donc il est difficile d'être curieux - mais c'est ce qu'on en rapporte - il faudrait pouvoir tout noter !"
- "Je me suis trouvé dans une grotte. Elle n'était pas éclairée, pourtant tout était clair, parfaitement clair sans aucune lumière... C'était la grotte des Trois Frères, je l'ai su après. Ça s'est passé de la même façon que pour les arbres ou les rochers, les symboles qui étaient sur les parois et leur signification étaient évidents pour moi, ils faisaient partie de moi. Plusieurs années après, je suis allé à une conférence où une spécialiste devait parler de la symbolique des peintures rupestres. Je suis resté pour discuter avec elle après sa conférence, elle m'a demandé sur quel chantier je travaillais ! Comment lui expliquer que je n'avais jamais mis les pieds dans une grotte, ni lu le moindre livre là dessus?"
Comment interpréter de tels paradoxes ? Le passage de la mort est-il l'entrée dans une région sans limite pour la conscience ?
Les trois dimensions connues (largeur, hauteur et profondeur) plus la quatrième (le temps) sont elles englobées par d'autres, un peu à la façon des poupées russes (cinquième, sixième, septième, etc), les cieux invisibles de la théologie chrétienne, les nombreuses demeures de la maison du Père (Jésus) ? Cela expliquerait dans les expériences de mort imminente que l'on puisse voir le film de sa vie en une fraction de seconde ou accéder à la lecture d'évènements passés ou futurs, ou voir en même temps de plusieurs points à la fois. La conscience évoluant dans une dimension englobant nos quatre dimensions connues, les notions habituelles de temps et d'espace disparaissent !
Quelque part, cela rejoint le catéchisme sur le point de l'omniprésence d'un Dieu qui voit tout, sait tout, etc. On pense également aux mystiques des grandes religions qui lisent dans les consciences et dans les coeurs, voient le passé et l'avenir, sont emportés dans l'extase vers le troisième ciel comme l'apôtre Paul :
- "Faut-il faire le fier ? Cela n'est sans doute pas convenable. J'en viendrai néanmoins aux visions et aux révélations du Seigneur. Je connais un homme dans le Christ, qui, voici quatorze ans - était-ce en son corps ? Je ne sais ; était-ce hors de son corps ? Je ne sais ; Dieu le sait - cet homme là fut ravi jusqu'au troisième ciel. Et cet homme là - était-ce dans son corps ? Etait-ce sans son corps ? Je ne sais, Dieu le sait - fut enlevé dans le paradis, et qu'il entendit des paroles ineffables qu'il n'est pas permis à un homme d'exprimer." (2 Corinthiens 12,1-4)
D'autres questions surgissent à l'inverse : les maladies dégénératives de la conscience de type alzheimer, l'alcool, la drogue, les traumatismes cérébraux divers mettent-ils la conscience entre parenthèse, une sorte de bouton "pause", de "mise en veille" ?
Dans les témoignages reçus sur les expériences de mort imminente on cite le cas d'aveugles qui ont vu ! Avec quels organes ? Leurs yeux ne pouvaient pas voir. Ce phénomène n'est pas uniquement lié à ces expériences singulières. Prenons le cas de la jeune sicilienne Anna Gemma di Giorgi, enfant née en 1939 sans pupille, donc aveugle de naissance, guérie miraculeusement par le prêtre italien padre Pio. Examinée par les médecins, ceux-ci constatèrent ensuite qu'elle voyait, bien que toujours sans pupilles ! Il n'y a jamais eu d'explication à ce phénomène. La jeune Anna est ensuite devenue religieuse et reste encore à ce jour un mystère pour la science.
Si le miracle peut s'affranchir des lois naturelles, c'est qu'il en existe d'autres, liées à un autre mode d'existence, à d'autres mondes (dimensions), au-delà de nos cinq sens. La conscience semble pouvoir les atteindre, soit dans le mysticisme religieux soit aux frontières de la mort.
La vie éternelle marquerait-elle l'entrée dans une région sans limite pour la conscience ? Nous allons tenter de répondre à cette question à partir d'autres pistes de réflexion. Ouvrons l'Evangile au moment de la transfiguration du Christ, là où le prodigieux se joint à l'humain :
- "Six jours après, Jésus prit avec lui Pierre, Jacques, et Jean, son frère, et il les conduisit à l'écart sur une haute montagne. Il fut transfiguré devant eux; son visage resplendit comme le soleil, et ses vêtements devinrent blancs comme la lumière. Et voici, Moïse et Élie leur apparurent, s'entretenant avec lui. Pierre, prenant la parole, dit à Jésus : Seigneur, il est bon que nous soyons ici; si tu le veux, je dresserai ici trois tentes, une pour toi, une pour Moïse, et une pour Élie. Comme il parlait encore, une nuée lumineuse les couvrit. Et voici, une voix se fit entendre de la nuée avec ces paroles : Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j'ai mis tout mon amour : écoutez-le! Lorsqu'ils entendirent cette voix, les disciples tombèrent le visage contre terre, et furent saisis d'une grande peur. Mais Jésus, s'approchant, les toucha, et dit : Levez-vous, n'ayez pas peur ! Ils levèrent les yeux, et ne virent que Jésus seul. Comme ils descendaient de la montagne, Jésus leur donna cet ordre : Ne parlez à personne de cette vision, jusqu'à ce que le Fils de l'homme soit ressuscité des morts." (Mathieu 17,1-9)
Par un acte extraordinaire de sa volonté, Jésus ouvre un point de passage entre notre monde terrestre et celui où existent ceux et celles qui nous ont quitté. Les barrières sont levées, les frontières sont abolies durant une courte période de temps ! Et soulignons-le, pour bien prendre la mesure du prodige, Moïse avait disparu depuis 1200 ans et le prophète Elie vivait 600 ans avant l'ère chrétienne...
Ce qui frappe encore dans ce récit, c'est le dialogue entre ces trois personnalités : Jésus, Moïse et Elie. La "Communion des Saints", cette formule utilisée dans le Symbole de la Foi (Credo des Apôtres) devient ici un fait établi. Les défunts sont les vivants d'une autre réalité...
Nous pouvons prier pour nos chers disparus, c'est la conviction de l'Eglise depuis toujours. Dans la "Communion des Saints" il est possible de dialoguer dans la prière et par la Foi, de s'aider mutuellement. Les racines de l'Eglise plongent autant dans le terrestre que dans le céleste. Nous croyons que les êtres aimés et enlevés par la mort ne sont jamais loin de nous. La Foi permet à notre esprit d'agir sans aucune limite. Selon l'enseignement de Jésus, elle soulève même les montagnes !
L'affirmation de l'omniprésence d'un Dieu qui voit tout et sait tout, donnée par le catéchisme, peut être reliée avec le logia 81 de l'Evangile de Thomas : Jésus dit: "Je suis la lumière, celle qui est sur eux tous. Je suis le Tout, et le Tout est sorti de moi et Tout est revenu à moi. Fends le bois: je suis là; soulève la pierre et tu m'y trouveras ! " Ce logia de Thomas ne manque pas de souffle. Nous vous recommandons la lecture de l'Evangile de Thomas (traduction de Gazinet avec commentaires) réalisée pour le compte de l'Institut Saint Jean Gerson par Mgr Patrick Truchemotte en 1985.
La révélation biblique d'un Dieu éternel situé hors de l'espace et du temps est largement connue. Lors de son apparition à Moïse dans le buisson ardent, lorsque le prophète lui demande son nom la réponse est : "je suis celui qui suis" (Exode 3,14). L'Eternel Dieu Très Haut appartient à l'essence, à ce qui est depuis toute éternité. Et Jésus déclare à son tour : "Je suis la résurrection et la vie" (Jean 11,25), ou encore : "Avant qu'Abraham fût, je suis." (Jean 8,59) Dieu est, dans le principe, l'essence, c'est sa spécificité. Dans l'existence, dans l'espace et dans le temps, il se manifeste par l'incarnation de son fils Jésus. Et aujourd'hui encore, celui-ci sert de marqueur temporel, puisque l'on compte les années à partir de sa date de naissance.
Comment comprendre les couloirs du temps ? Nous pourrions dire qu'à l'échelle du divin, hors de l'espace et du temps, il n'existe que sept jours immuables, ceux de la Création. Ils reflètent la volonté divine, la conception immaculée, l'idée non salie de la Création. Et Dieu vit que cela était bon nous dit la Genèse... Et puis il y a ce que j'appellerai les "couloirs du temps", là où les sept jours de la Création se répercutent dans l'infini de l'espace et du temps. Dans ces couloirs, c'est là qu'il nous faut chercher la racine du mal, comprendre qu'il appartient à l'existence et non à l'essence, qu'il sème perpétuellement l'ivraie dans le bon grain de la Création.
En se promenant, si j'ose me permettre cette expression, dans ces couloirs - dans ce que la science moderne appelle le Continuum espace-temps ou continuum spatio-temporel : espace à quatre dimensions, dont la quatrième est le temps (longueur, hauteur, profondeur, temps) - nous avons vu que la conscience, dans les expériences de mort imminente, pouvait accéder à la lecture d'évènements passés ou futurs, voir le film de sa vie, etc. Nous savons également par les textes bibliques, les vies de saints, par d'autres cultures religieuses que les grands mystiques accèdent à cette lecture des évènements passés ou futurs. Il est donc possible de "s'y promener".
A titre d'anecdote, notons que le gigantesque accélérateur de particules du Cern à Genève a confirmé expérimentalement que le temps ne soit pas le même selon la vitesse de déplacement des particules dans l'espace.
Se "promener" dans les couloirs de l'espace et du temps, ne serait-ce pas un des aspect de la vie éternelle ? En dehors du temps et de l'espace, notre conscience est appelée à vivre son éternelle existence.
Elle est le fondement de la foi chrétienne. Passons sur le miracle proprement dit. Si nous croyons que Jésus est le Fils de Dieu, donc Source de Vie, il n'y a rien "d'étonnant" à cela. Par contre les manifestations du ressuscité sont extraordinaires :
- il ne s'agit pas d'un fantôme ou d'un esprit puisqu'il se fait toucher par ses disciples et mange avec eux.
- Bien qu'on puisse le toucher, qu'il s'agisse d'un être de chair et de sang, il apparaît et disparaît comme un esprit au milieu de ses apôtres.
- Il peut changer d'apparence, puisque deux de ses disciples (les pèlerins d'Emmaüs) ne le reconnaissent pas alors qu'ils discutent et font route avec lui.
- Il peut quitter ce monde avec son corps (Ascension) et annonce son retour avec ce même corps à la "fin des temps".
Pour sourire un instant, je me souviens d'une séance de catéchisme avec les enfants au cours de laquelle je m'efforçais d'expliquer le Christ ressuscité. Une petite fille au regard vif et intelligent me déclara soudain : "Jésus s'est téléporté !" Il ne faut jamais sous-estimer l'intelligence des enfants. La petite fille avait utilisé un mot qui avait un sens pour elle. Je ne sais si elle regardait à la télévision les aventures du capitaine Kirk dans le feuilleton américain de science fiction Star Trek, mais cette remarque m'a toujours semblée très pertinente.
Comme l'Evangile annonce la vie éternelle mais aussi la résurrection de la chair pour toute l'humanité, on ne peut manquer de s'interroger. Comment cela se passera-t-il pour nous ?
C'est une affirmation du Credo des apôtres, comme celle de la "vie du siècle à venir" dans le credo de la messe. L'affirmation de la vie éternelle pose question, mais la résurrection de la chair plus encore. L'apôtre Pierre dans sa deuxième épître évoque des "cieux nouveaux et une nouvelle terre" (2 Pierre 3,13). Doit-on imaginer une re-création de l'univers avec des lois physiques nouvelles ? Après la "fin des temps", c'est à dire la fin de l'univers sous sa forme actuelle un monde nouveau existera-t-il ? Le livre de l'apocalypse de Jean au chapitre 21 semble nous dire que oui. Mais il faut bien admettre que cela nous dépasse : parce qu'en dehors de l'espace et du temps d'aujourd'hui, ce monde existe peut-être déjà ailleurs ? Dans un autre espace-temps...
Ce monde nouveau attendu par les croyants serait différent de celui-ci. Dans l'espace-temps du péché la maladie, la souffrance, la mort et le mal existent. Dans ce que tentent de décrire les textes bibliques à propos des cieux nouveaux et de la nouvelle terre, ces maux sont appelés à disparaître. Difficile à imaginer aujourd'hui. Ce sont des perspectives portées par une espérance, une espérance venue avec la Christ.
Imaginer un monde sans la loi du plus fort, cette loi de la jungle qui régit le monde terrestre dans lequel nous naissons et existons aujourd'hui. Notre présent actuel est bien différent de ce qui est porté par l'espérance chrétienne. Et parce que les huit béatitudes prennent à contrepied les valeurs de ce monde, seul le Christ peut se permettre de déclarer que les "derniers seront les premiers et les premiers les derniers" : mais dans une autre réalité, à des années lumières du présent de la vie actuelle. Car il faut que la justice soit sauve.
Cette notion de jugement a également son importance, elle est annoncée par l'Evangile dans le cycle de la fin des temps. La vie terrestre actuelle serait une sorte d'apprentissage, d'école. Discerner le bien du mal, développer ses talents, aller au bout de ses rêves, témoigner qu'il est possible de vivre autrement qu'en pillant les autres et en les dévorant, tel serait le défi de cette vie terrestre selon l'Evangile.
Et comme nous ne disposons pas des mêmes atouts et des mêmes chances dans cette vie, il est bon que le Père céleste soit rempli d'indulgence pour les erreurs si nombreuses qui jalonnent notre parcours. Si l'on prie pour les défunts, c'est parce que l'on croit qu'il est toujours possible d'évoluer, d'apprendre, même au-delà des portes de cette vie terrestre ! Cela est réconfortant. "Je ne suis pas venu appeler des justes, déclare Jésus, mais des pécheurs." "Car le Fils de l'homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu." (Luc 19,10)
Loin des intégrismes, des dogmes qui étouffent, des idées qui enferment l'esprit et rétrécissent la vue, l'Evangile porte une espérance. Nous ne connaissons pas le futur, nous ne pouvons qu'imaginer. Et c'est plus facile et plus léger, dans l'espérance !
Bien malin celui ou celle qui pourrait nous indiquer précisément ce qui se passe après la mort. Même les expériences de fin imminente vécues par des personnes arrivées aux frontières de cette vie sont des témoignages de personnes qui sont revenues. Et vivantes !
"Je m'en vais vers un grand peut-être" aurait déclaré Rabelais avant de mourir. Le chrétien est porté par une assurance immense qui s'épanouit dans la vie éternelle, mais c'est un acte de foi, et c'est personnel à chacun. Croire en la résurrection du Christ, c'est un acte de foi, il n'existe pas de preuves. Devant la mort on a vu des croyants trembler, d'autres non, des incroyants être envahis par la peur, d'autres non. Il y a la question du courage, il y a celle de la foi, elles sont d'ailleurs liées quelque part. Les réponses sont personnelles et différentes pour chaque être humain : tempérament, caractère, épreuves, parcours de la vie, etc.
Vivons-nous plus d'une vie ? Dans d'autres mondes, sous d'autres étoiles, ou simplement par delà les portes de cette vie terrestre ? Certains croient en la réincarnation, d'autres non. Au fond est-ce que cela revêt une grande importance ? L'important n'est-il pas de donner un sens à sa vie dès à présent ? Nous mourrons tous un jour. Le croyant dira qu'il entre dans la vie, qu'il espère éternelle. Disons aussi que cette éternité n'a de sens que dans et par amour, pour éviter un "éternel ennui".
Monseigneur Thierry Teyssot