L'Evangile selon Saint Mathieu est le seul à faire mention de ces
personnages mystérieux venus d'Orient. La plupart des historiens
s'accordent pour désigner la Chaldée (province de Perse)
comme étant leur patrie d'origine.
Il faut savoir en effet que les
chaldéens étaient férus d'astrologie et de religion.
Leur connaissance de l'astrologie peut expliquer leur voyage vers l'humble crèche de Bethléem; pour des érudits dans cette science vieille comme le monde il devait être facile de repérer dans le ciel des signes annonçant la naissance d'un être exceptionnel.
Mais à notre avis cela n'explique pas tout.
"Dieu a parlé par les prophètes" dit le
Credo.
Faut-il
limiter ce courant prophétique au seul peuple d'Israël ?
Nous ne
le pensons pas.
Nous croyons volontiers qu'en vertu de son élection
le peuple de la Thora bénéficia des plus grandes faveurs divines;
mais ce serait injurier le Trés-Haut d'imaginer que le messianisme
ne fut pas universel.
Des siècles avant Moïse les égyptiens vénéraient
la déesse Isis qui devait enfanter.
En Gaule même,
les druides révéraient la Virgo pariturae.
Le
mythe d'une vierge devant mettre au monde un enfant-Dieu est commun à
bien des peuples avant la venue du Christ.
Et là où certains nient aujourd'hui la réalité historique de l'Incarnation du Fils de Dieu à Bethléem - parce que reprenant des mythes déjà existant - nous nous émerveillons au contraire de ce que la Sagesse de l'Eternel Dieu Trés-Haut ait permis l'accomplissement de telles prophéties.
Ces Mages qui d'ailleurs nous dit Saint Mathieu: "se prosternèrent devant l'enfant et l'adorèrent" (Math. 2,11).
Les Pères de l'Eglise ont considéré que la venue de ces hommes à la crèche - étrangers au peuple d'Israël - révélait le caractère universel de la Mission du Christ.
Ces personnages représentent en effet les peuples païens invités à recevoir la révélation de la naissance du Fils du Dieu Vivant.
S'appuyant sur le psaume 72 de la Bible, la tradition en a fait des rois.
Si leur nombre fut fixé à
trois (car Mathieu ne précise pas combien: "des
mages venus d'orient") c'est en raison des trois offrandes
apportées à la Sainte Famille:
l'or,
comme témoignage de la royauté divine du Christ;
l'encens,
comme symbole de la prière, d'une prière
parfaite qui peut tout et obtient tout;
la myrrhe, comme
symbole d'éternité, parce que cet enfant tient
dans ses mains les clefs de la vie éternelle (la myrrhe étant
utilisée autrefois par les anciens pour embaumer les morts).
A partir du VIème siècle on les différencia (Gaspard, Melchior, Balthazar), et on les assimila aux trois âges de la vie (jeunesse, maturité, vieillesse).
Plus tard on leur attribua des races différentes:
Melchior
était blanc, Gaspard jaune, Balthazar
noir,
symbolisant ainsi l'ensemble de l'Humanité.
En 1986, alors prêtre attaché au service de la primatiale Saint Jean-Baptiste de Bordeaux j'assistais à une conférence donnée dans le cadre du cercle d'études biblique par notre regretté Patriarche, S.B. Mgr Patrick Truchemotte, sur le culte de Mithra.
L'Evangile selon Saint Mathieu rapporte qu'à l'époque de la naissance de Jésus des Mages arrivèrent qui venaient de l'Orient. Selon toute probabilité ces voyageurs spirituels appartenaient à une religion extrêmement antique dont la figure la plus connue des historiens est celle d'un très grand sage nommé Zarathoustra (Zoroastre).
Mais il est bon de préciser que Zoroastre n'était pas le créateur de cette religion dont l'origine se perd dans la nuit des temps. Il n'avait fait que lui rédiger un code et des principes de vie. En fait, des siècles avant Zoroastre, un Yasata, un esprit céleste était déjà révéré des peuples indo-iraniens: il portait le nom de Mithra.
Il n'est pas sans importance de savoir que les Mages qui vinrent adorer l'enfant de la crèche tenaient ce nom de Mithra comme profondément vénérable. Le nom de Mithra pouvait se traduire par des mots comme: pacte, contrat, alliance... Son rôle était en effet de maintenir l'alliance entre le Dieu Suprême et les humains...
Le livre de l'Avesta - parlant de lui - disait: "le soleil est son oeil".
Une très ancienne tradition circulait parmi les maguséens qui formaient une école, un clan particulier, chez les fidèles mazdéens; il était prédit qu'un Sauveur sacré devait naître dans une caverne et que ce petit enfant serait la présence visible de Mithra.
Y avait-il un autre messianisme que celui des prophètes de la Bible ?
Dans son érudite étude "Histoire de la Religion et de la
Philosophie Zoroastriennes", Paul du Breuil rappelle qu'en Iran
oriental des Mages astrologues se recueillaient chaque année sur une
montagne pour y guetter durant trois jours l'étoile du grand roi.
Il
cite le livre de Seth et l'Opus Imperfectum in Matheum et écrit, page 127
de son livre, ces lignes propres à nous éclairer:
- "En
effet, le thème des bergers qui reconnaissent ou recueillent un enfant
royal est propre à la légende iranienne et l'image de la
naissance du Sauveur dans une caverne appartenait aux légendes parthes du
Saoschian-Mithra, incluant le mythe de la fécondation virginale de la Mère.
Parallèlement à l'Apocalypse d'Hystape, une prophétie
zoroastrienne sur la naissance de l'idéologie royale parthe circulait
parmi les maguséens".
En résumé nous pourrions dire que si les Mages vinrent à la Crèche, c'est qu'ils avaient été avertis qu'un être extraordinaire allait naître, un être représentant tout autre chose que le Messie de la nation d'Israël.
L'Evangile de l'Enfance, un texte arabe de source syriaque
affirme:
- "Des Mages arrivèrent d'orient à Jérusalem,
selon ce que Zoroastre avait prédit".
Pour bien nous mettre à la place de ceux que Tertullien appelle les
Rois Mages, ouvrons "l'Histoire Générale des Religions"
de Salomon Reinach; il ne fait que nous rappeler l'essentiel des
croyances mazdéennes:
- "A la fin des siècles,
Ahura Mazda engagera une lutte décisive contre Ahriman et l'emportera grâce
à l'archange Sraoscha (l'obéissant), vainqueur du démon Ashéma.
Une Vierge concevra alors de Zoroastre un Messie, le Victorieux, le second
Zoroastre qui fera ressusciter les morts et d'abord le premier mort, l'homme
primitif: Gayomart. Les bons seront séparés des méchants,
mais les peines de ceux-ci ne seront pas éternelles".
Ce texte, nos Mages en sont certainement imprégnés; ils attendent la venue de Celui qui doit naître d'une Vierge et juger les bons et les méchants. Mais une autre constatation est à faire. Nos Mages - après avoir adoré - repartent avec la conviction qu'ils ont trouvé l'Incarnation du Dieu Trés-Haut, conforme aux prédictions antiques.
Et comme pour les conforter dans leurs conclusions, voici qu'ils
sont en quelque sorte pris en charge par le courant miraculeux qui entoure
l'enfant...
Alors qu'un songe angélique est envoyé
à Joseph pour qu'il emmène la Sainte Famille en Egypte,
un autre songe est envoyé aux Mages - c'est Saint
Mathieu qui nous le rapporte - pour qu'eux aussi modifient leur chemin.
Mais où va-t'il ce chemin modifié ? Sans doute au point même d'où sont partis nos voyageurs. Et là, une fois de retour, que vont-ils faire ?
En ce cas deux choses doivent se passer, humainement
pensant:
Du côté de la sainte Famille,
quelque chose de la philosophie mazdéenne doit pénétrer et
peut se retrouver dans certaines expressions et agissements de Jésus,
considéré dans sa nature humaine.
Du côté
des Mages, une imprégnation du message prophétique qui
risque de les avoir amené à modifier leur comportement cultuel...
Et cela expliquerait dans une certaine mesure la naissance d'une autre forme du
culte de Mithra au sein de cette très curieuse religion dont
Bordeaux fut un point
important...