Le promeneur en visite au Pays Basque s'étonne parfois de découvrir de ci, de là, d'étranges monuments appelés: discoïdales.

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Ces lourdes stèles en granit composées d'un socle de forme généralement trapézoïdale, surmonté d'un disque, se rencontrent habituellement dans les cimetières, mais pas toujours... Elles ne correspondent pas forcément à des tombes. Elles seraient l'héritage d'une pratique très ancienne antérieure à l'apport du christianisme. Surtout, les dessins gravés sur le disque font appel à un symbolisme d'une très grande richesse.

Incontestablement, leurs auteurs étaient experts dans cette forme de langage. Nous nous proposons, à travers cet article, de vous guider dans la découverte des symboles émanant du tracé mystérieux de ces pierres d'exception.

La Discoïdale de la Sagesse

A Suhescun, se trouve une stèle au tracé remarquable. Selon la légende le roi Salomon lui-même en aurait gravé les symboles. Les deux triangles impénétrés représentent une figure bien connue des portiers et autres symbolistes appelée: "Sceau de Salomon". Rappelons cette signification à nos lecteurs:

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La Trinité divine d'un côté (Père, Fils et Esprit-Saint) - représentée par le triangle avec la pointe en bas - descend dans la trinité humaine (corps, âme et esprit). L'équilibre entre les deux courants apporte l'état de sagesse, de paix, de bonheur.

Autrement dit trop près du feu l'on se brûle, trop loin du feu l'on se gèle. Le mal est relatif, le feu est bon; c'est la position de l'être humain par rapport à la voie d'équilibre qui est souvent déplacée.

Tiraillé entre deux forces contraires, le trop et le trop peu, l'être humain avance péniblement, avec la souffrance qui en résulte. Le trop peu empêche l'homme d'avancer. Il est l'ennemi du progrès, avare et sec de coeur il empêche les blés et les idées de germer, retarde les pendules, fait ralentir les coeurs, rend poltron au moment du témoignage.

Le trop, par contre, incite l'être humain à toujours courir, veut lui faire construire des tours de Babel, précipiter les découvertes et les utiliser sans songer aux conséquences, transformer les arbres en forêts touffues et inextricables où l'homme ne peut plus avancer. Il fait battre les coeurs à se rompre et rend téméraire jusqu'à la destruction.

Entre ces deux forces contraires se trouve la voie chrétienne. C'est aussi la loi du Yin et du Yang du continent asiatique, la vieille philosophie des religions orientales.

Mais sur le sceau de Salomon de la discoïdale de Suhescun des feuilles ont poussé à chaque écoinçon... Elles représentent une nouvelle forme de Sagesse. Le courant de grâce apporté par Jésus-Christ symbolise ce nouvel apport qui se présente - non plus par six - mais par douze côtés: les douze apôtres et les douze piliers de la Jérusalem céleste telle qu'elle est décrite dans le livre de l'Apocalypse.

Enfin la croix centrée à l'intérieur du sceau de Salomon représente bien le point d'équilibre à atteindre, ce chemin de la perfection qu'est la voie chrétienne.

Le Pentalpha d'Aïnhice

A Aïnhice, il désigne une discoïdale sur laquelle est sculpté l'antique symbole de la connaissance: l'étoile à cinq branche. Elle représente la quintessence, de quinte (ou pente en latin) = cinquième essence, c'est à dire ce qui est essentiel à savoir.

Dans l'Evangile cette étoile guida les mages en indiquant le chemin du Salut, celui du nouveau-né de l'humble crèche de Bethléem. Aux origines de l'humanité par contre, elle symbolise le péché originel. Pourquoi la pomme représente-t-elle le fruit de la connaissance du bien et du mal ? Coupée en deux ses pépins dessinent une étoile... à cinq branches...

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Remarquons sur la discoïdale d'Aïnhice que l'étoile est centrée d'une croix. Ceci afin de bien symboliser que le chemin du Salut passe par la connaissance (la rencontre) de Jésus-Christ, comme pour les rois mages.

Enfin les trois oiseaux symbolisent les anges du ciel envoyés par la Trinité divine pour guider et protéger l'être humain dans sa queste ici-bas.

Rituel d'Exorcisme

Au musée basque de Bayonne se trouve exposée une curieuse stèle discoïdale dont le mystérieux tracé évoque une sorte de "souricière à entité démoniaque". Ne riez pas ! Les Evangiles nous content qu'à maintes reprises Jésus a lutté contre ces forces mauvaises, avec succès d'ailleurs. Les sages qui ont fixé le tracé des discoïdales du Pays Basque avaient - nous semble-t-il - une connaissance certaine du danger de ces forces obscures et ténébreuses.

Le livre du prophète Isaïe nous révèle que la plupart de ces esprits malfaisants se trouvent dans ce que son auteur appelle le firmament, c'est à dire sous le premier ciel atmosphérique et sidéral qui se trouve au-dessus de nos têtes, ce que l'Apôtre Paul reprend dans son épître aux Ephésiens (Eph. 6,12). Mais laissons de côté la théologie du mystère des sept cieux pour nous intéresser au curieux tracé de cette discoïdale.

Ces cinq cercles portent chacun une croix. Lorsqu'un objet maléficié est placé au centre, l'exorciste ordonne à la force démoniaque de se dégager. Cette force va se répandre sur la croix centrale mais ne pourra y demeurer, car la croix la brûlera. Elle se dirigera donc sur l'une des quatre branches du piège, mais elle sera toujours sur une croix. Et en tournant sur les cercles elle retombera fatalement sur une croix. Une fois qu'elle sera épuisée de tourner comme un écureuil en roue elle quittera ce monde et passera sur un autre plan.

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Le tracé de cette discoïdale est remarquable de sagesse. Les archives des presbytères de campagne évoquent souvent - dans un passé pas si reculé que ça - les méthodes des sorciers qui, (selon les mémoires du curé d'Arette en 1671 et une monographie manuscrite de la paroisse d'Argelès vers 1890), "donnent des maladies de langueur en fourrant dans les matelas, oreillers ou lits de plumes des figures de serpents, couronnes, coeurs, bras, jambes, etc... constituées de plumes entrelacées ou fichées dans de l'argile ou de la cire avec tant d'art qu'il est presque impossible de les défaire et le seul moyen de guérir consiste à faire brûler ces figures."

Les sages qui ont sculpté le tracé de la discoïdale du musée basque de Bayonne avaient une profonde connaissance des leçons de l'Evangile. En effet, jamais l'on ne doit brûler ces boules de plumes ! Il est préférable de les exorciser. Le feu ne fait que libérer les forces malignes attachées qui vont aussitôt chercher d'autres complices infernales pour revenir en nombre. En (Luc 11,26) Jésus a bien parlé d'un démon qui, chassé, revenait avec sept autres esprits pires que lui...

La Discoïdale de Souraïde

Elle nous permet de retrouver le signe du calvaire: au centre la croix, l'arbre de vie pour tout chrétien; le bon larron est symbolisé par la croix à traverse droite, le mauvais par la traverse à la croix recourbée.

Le Serpent, le Satan s'enroule autour de l'arbre de la connaissance du bien et du mal du jardin d'Eden. Il est symbolisé par la lettre "S", mais inversée. Pour ceux qui ont atteint le Royaume, le "S" reprend sa vraie position, c'est le "S" de Sauveur, de Salut... C'est le Serpent d'Airain que fit poser sur une croix Moïse dans le désert pour que ceux qui le contemplent reviennent à la vie (Nombres 21,9); c'est - bien sur - Jésus, sur la croix.

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La forme d'échiquier de cette discoïdale a aussi son symbolisme. Les multiples croisillons indiquent la marche de la vie humaine dans les cases d'un incessant combat.

La Discoïdale d'Aneto

Ce dessin est la réplique d'une tombe couchée, prés du pic Aneto. Un regard superficiel imaginerait une grosse pieuvre. Le symboliste y verra le mouvement de la vie, la rotation des astres, la vie cellulaire se développant à partir de la première cellule.

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Il remarquera en haut et à gauche le point, vraisemblablement le point de départ de la Création. Plus loin à droite ses yeux s'arrêteront sur la croix, symbole d'achèvement pour le chrétien, croisement de deux routes, don du Christ, grand carrefour de l'unité.

De Nombreuses Questions

Que de mystères en étudiant les dessins étranges sculptés sur les stèles discoïdales du pays basque; d'où viennent-elles, qui étaient leurs auteurs ?

Selon certains érudits les stèles seraient l'héritage d'une ancienne pratique en usage en Europe bien avant la christianisation, avec la stèle monolithe fichée en terre, verticalement, à la tête du mort; un mort que l'on enterre traditionnellement face au soleil levant, avec les pied vers l'est. Remarquons leur aspect anthropomorphe, c'est à dire le rappel de la forme humaine: le disque symbolise la tête et le socle le corps. Pour d'autres auteurs, les stèles discoïdales seraient un monument cosmique: le disque représenterait le soleil et le socle la terre. Pour d'autres encore, elles seraient des émetteurs de cette force méconnue qui émane d'un tracé.

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Peu importe au fond, il y a certainement du vrai dans chacune de ces théories. Mais considérer les stèles discoïdales comme de simples éléments d'ornementation funéraire serait très réducteur. La richesse du langage symbolique de leur tracé laisse penser que leurs auteurs vivaient au Moyen-Age, époque à laquelle le symbolisme était une forme de langage courant; en témoignent d'ailleurs toutes les sculptures de nos cathédrales. Notons aussi que les églises romanes - comme les cathédrales - sont toujours orientées à l'est, comme la prière des chrétiens à cette époque, car l'orient symbolise la montée du soleil spirituel qu'est le Christ.

Notre époque moderne et rationnelle a perdu de vue toutes ces réalités. Dans la plupart des Eglises et des séminaires par exemple, lorsqu'on forme et ordonne un prêtre on ne l'instruit plus du symbolisme chrétien et on ne lui confère plus l'Ordre mineur de portier. L'Eglise Gallicane fait partie des rares Eglises chrétiennes à avoir conservé l'enseignement du symbolisme et la célébration de l'ordination portiorale; nous y sommes attachés. Jésus parlait en parabole. Une phrase peut être mal traduite, mais la valeur d'un symbole demeure.

D'où viennent les basques ? Encore une autre énigme; des études génétiques récentes ont révélé que les européens de l'Ouest sont génétiquement proches les uns des autres, à deux exceptions près: les lapons (qui seraient d'origine mongole), et les basques. Cette singularité du peuple basque laisse supposer une grande ancienneté dans l'Europe occidentale. Selon certaines sources des sortes de druides seraient jadis venus de l'océan, il y a de cela plusieurs millénaires. Par la suite le christianisme aurait marqué de son sceau leurs rites païens. Les discoïdales du pays basque sont donc loin d'avoir livré tous leurs secrets.


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