Ils tentèrent de faire admettre que l'Empereur Constantin (+337)
avait jadis donné à l'un de leur prédécesseur les célèbres
Etats pontificaux (qui se limitent aujourd'hui au 44 hectares du Vatican,
mais qui englobèrent pendant des siècles toute la partie centrale
de l'actuelle Italie).
Cette "donation" assimilait
l'évêque de Rome à un véritable
souverain. En même temps, elle préparait le
terrain pour la prochaine étape.
Il est évident que c'était faire fi de la tradition patristique et conciliaire ! Certes, le 4ème concile oecuménique (Chalcédoine - 451) avait bien reconnu à l'évêque de Rome le premier rang d'honneur parmi les quatre autres patriarches, mais en ajoutant expressément que cette primauté d'honneur lui avait été attribuée (canon 28) "parce que Rome était la ville régnante..." comme ancienne capitale de l'Empire...
Du reste, et nous sommes là au VIIème siècle, l'un des
plus illustre évêque de Rome, le pape Saint Grégoire le
Grand (Lib.V Epist.18 - Lib.VIII Epist.30) n'hésitait pas à
déclarer au patriarche Jean d'Alexandrie que le titre d'évêque
universel (et alors il ne s'agissait encore que d'un qualificatif honorifique)
est "extravagant, orgueilleux, impie, cause de division dans l'Eglise".
Il
ne souffrait pas qu'on lui décernât un "titre aussi
criminel et blasphématoire envers Dieu". Le patriarche Jean
l'ayant appelé évêque universel, il lui répondit sur
le champ: "Je vous en prie, ne donnez jamais ce nom à personne;
mais rendons grâce à Celui qui a fait de tous les hommes un seul
troupeau, sous un seul pasteur, qui est Lui-Même".
"Quiconque,
disait-il en une autre circonstance, s'appelle évêque universel ou
désire ce titre est, par son orgueil insensé, le précurseur
de l'Antéchrist." Qu'eut-il dit s'il se fut trouvé au
concile Vatican 1 de 1870 ?
Comme l'on pouvait s'y attendre, la recherche et l'instauration du pouvoir
absolutiste romain allaient produire la première grande cassure de
l'Eglise.
Vers 1054, l'Est et l'Ouest se séparèrent.
L'attachement des Eglises d'Orient aux grands principes qui avaient présidé
au développement des institutions chrétiennes ne pouvait
s'accommoder de la dérive dominatrice du siège latin.
De plus, l'évêque de Rome avait au mépris de la
tradition ecclésiale modifié le Symbole de la Foi
(texte du credo de
Nicée-Constantinople).
Il
changeait la formule: l'Esprit procède du Père - en y ajoutant -
"et du Fils" (en latin filioque), contrairement aux
enseignements mêmes du Christ-Jésus:
"Je vous enverrai d'auprès du Père, l'Esprit de Vérité
qui procède du Père" (Jean15,26).
L'Orient ne
pouvait se résoudre à accepter le contournement de l'Evangile et
l'atteinte aux déclarations d'un concile oecuménique.
Une fois la rupture consommée, il n'y eut plus de frein en Occident pour barrer la route au pouvoir de plus en plus tentaculaire de Rome. La mémoire de l'ancienne Constitution de l'Eglise ne subsistera guère plus qu'à travers les thèses gallicanes.