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Vu les termes du Concordat de 1801, la situation d'une Eglise Gallicane indépendante
de Rome était jusque là illégale.
Seuls étaient
admis à fonctionner les cultes: catholique-romain, protestant et israélite.
Le décret du Président de la République vient corriger
cette lacune.
Le culte catholique-gallican aura droit de cité
en France.
Nous retrouvons le célèbre prédicateur après sa démission de l'Eglise Romaine. Fort du soutien manifesté par de nombreux prêtres et fidèles au lendemain de sa célèbre protestation contre "le prétendu dogme de l'infaillibilité du pape", le Père Hyacinthe pouvait être tenté de structurer le vaste courant gallican d'opposition à l'absolutisme du Vatican. La nuit de Noël 1872 il célèbre la messe et baptise à Paris, mais la rigidité légale du Concordat lui interdit la célébration d'un culte public. Il quitte donc la France et s'exile en Suisse. Entre temps il épouse Emilie Meriman. Il est alors âgé de 45 ans. En mars 1878 il rentre à Paris, décidé à créer une Eglise catholique indépendante en France, quelles que soient les difficultés.
Il commence par faire des tournées de conférences pour faire connaître son vaste projet. En juillet 1878, l'Eglise Anglicane - en la personne de l'archevêque de Canterbury - annonce qu'elle protégera et soutiendra la nouvelle Eglise Gallicane.
Le 9 février 1879, une chapelle est inaugurée rue Rochefort dans le 9ème arrondissement à Paris. De nombreux fidèles se pressent pour écouter le Père Loyson. L'idée d'une Eglise de France indépendante fait son chemin et mobilise de nombreuses bonnes volontés - non par nationalisme - mais par opposition au centralisme et au totalitarisme romain.
L'idéal gallican du Père Hyacinthe souhaite en effet favoriser
la prise d'identité des Eglises locales, avec leurs aspirations légitimes,
leurs problèmes spécifiques, etc. Il est oecuménique:
le
10 août 1879 a lieu une réunion à Berne (Suisse) sur le thème
de l'inter communion.
Y participaient: Mgr Edouard Herzog, évêque
de l'Eglise Catholique-Chrétienne de la Suisse, Mgr Joseph Reinkens, évêque
de l'Eglise Catholique Indépendante d'Allemagne (équivalents
suisse et allemand de l'Eglise Gallicane - fondées en réaction au
concile du Vatican de 1870), Mgr Henry Cotteril, évêque de l'Eglise
Anglicane, le R.P. Hyacinthe Loyson, pour l'Eglise Gallicane.
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En 1880, les effectifs de l'Eglise Gallicane progressent, de nombreuses personnes viennent en masse écouter l'illustre prédicateur. La chapelle de la rue Rochefort devient trop petite. Le 6 mars 1881 un nouveau lieu de culte est inauguré rue d'Arras, toujours à Paris, d'une capacité de 1500 fidèles toujours réguliers et assidus aux offices.
C'est à ce moment qu'intervient le fameux décret du 3 décembre 1883. Sur le plan juridique, la situation de l'Eglise Gallicane est jusque là illégale, mais du fait de sa très grande notoriété le Père Loyson est quasiment intouchable. A la demande de trois amis du Père Hyacinthe, membres du Conseil Directeur de la paroisse, le Président de la République autorise le fonctionnement légal de la chapelle gallicane sise rue d'Arras à Paris. L'Etat ne peut reconnaître le culte catholique-gallican: le carcans terrible imposé par le concordat le lui interdit. En revanche, le Président de la République peut autoriser la célébration d'un culte public non reconnu par l'Etat.
En fait, Jules Grevy et son Ministre de l'Intérieur Waldeck Rousseau contournent la loi pour répondre à l'attente de nombreux fidèles fermement attachés au gallicanisme. Ce décret eut-il une influence sur la future loi de 1905 dans laquelle la République déclara ne plus reconnaître, salarier et subventionner aucun culte ? C'est une hypothèse à considérer. En tout cas, vingt-deux ans plus tard, soit le 9 décembre 1905, les parlementaires français exprimeront leur volonté de voir la France se débarrasser du catholicisme "à la Syllabus". Ils promulgueront la fameuse loi de séparation de l'Eglise et de l'Etat.
Le décret du 3 décembre 1883 laissait entrevoir d'immenses possibilités pour le développement de l'Eglise Gallicane. L'autorisation de Jules Grevy aurait pu être étendue à d'autres paroisses (celle de l'Abbé Junqua à Bordeaux par exemple), à de futures chapelles constituées. Nous savons qu'existait en France un courant favorable à la constitution d'une Eglise catholique débarrassée de l'ingérence du Vatican. Une partie non négligeable du clergé français aurait accepté de se placer sous la juridiction d'un épiscopat franchement gallican. Seulement voilà: le R.P. Loyson refusa la consécration épiscopale proposée par l'Eglise Anglicane. Choix dramatique lourd de conséquences qu'il ne nous appartient pas de juger. La charge épiscopale suppose en effet d'assumer la responsabilité morale, spirituelle et administrative d'une Eglise. Cette tâche effrayait-elle le Père Hyacinthe ? Nul ne sait. Mais sans au moins un évêque pour l'administrer l'Eglise Gallicane ne pouvait se développer: impossible pour elle d'ordonner de nouveaux prêtres, de mettre en place la nécessaire structure (formation des clercs, statut des paroisses, coordination du clergé, etc).
Qu'advint-il alors de l'oeuvre du Père Loyson ? Environ un an après le décret du Président de la République, l'illustre prédicateur envisagea de se démettre de sa charge de recteur de la grande paroisse gallicane de Paris. Les fidèles et son Conseil de direction le persuadèrent de rester en fonction.
Mais l'arrivée en 1887 d'un vicaire ordonné par la Suisse (Abbé Volet) poussa le Père Hyacinthe vers la sortie. On lui reprocha son mariage contracté en 1872, ses idées oecuméniques un peu trop en avance sur son époque. On oubliait pourtant que ces mêmes idées généreuses attiraient les foules dans son église.
Le 3 mars 1893 le Père Hyacinthe fut obligé de démissionner. Le 1er mai, Mgr Gul, archevêque de l'Eglise Vieille-Catholique de Hollande prit possession de la paroisse parisienne ex-gallicane au nom de l'Union d'Utrecht. Mais des divergences naquirent parmi les fidèles. La communauté se scinda en deux blocs. Une moitié accepta la tutelle hollandaise, emmenée par les Abbés Volet et Van Thiel; l'autre moitié conduite par l'Abbé Bouland refusa de se soumettre au siège hollandais. Il y eut alors rupture et constitution de deux paroisses distinctes à Paris: l'une vieille-catholique, soumise à Utrecht; l'autre gallicane, sous la direction spirituelle de l'abbé Bouland. Cependant, ni l'une ni l'autre n'auront l'impact charismatique du Père Hyacinthe. Elles se désagrégeront lentement.
Force est de constater dans cet épisode, et même plus tard, que les catholiques gallicans n'avaient pas quitté Rome pour se placer sous l'autorité d'un siège étranger: Utrecht, Canterbury ou patriarcats orthodoxes (Moscou ou ailleurs).
Le catholicisme gallican a toujours voulu rester libre et administrer lui-même sa propre Eglise Gallicane. C'est ce que put réaliser Mgr Giraud par la suite, notamment en créant le siège patriarcal de Gazinet en 1928.
A 67 ans Hyacinthe Loyson reprend son bâton de pèlerin et de conférencier. On l'entend en France et en Suisse. Il s'éteint à Paris en 1912, alors âgé de 85 ans.
Note: - Il sera utile à nos lecteurs d'apprendre que le Père Hyacinthe fut en relation avec Mgr Vilatte comme en témoigne l'étude de l'abbé Parisot publiée en 1899.