Pour de nombreuses raisons maintes fois détaillées dans les colonnes du journal Le Gallican nous avons expliqué pourquoi l’Eglise Gallicane admettait le mariage des prêtres. Jésus a choisi des apôtres mariés, il devait bien savoir ce qu’il faisait… La tradition rapporte que tous les apôtres vivaient dans le mariage, à l’exception de Saint Jean, qui était trop jeune.

Mais les adversaires du mariage des prêtres ne craignent pas de mettre en avant, pour dénoncer cette noble institution, la parole suivante du Christ : "Nul ne quitte maison, femme, frères, parents, enfants à cause du Royaume de Dieu sans en recevoir la récompense." Forcés de relever que les apôtres étaient mariés, ils s’empressent d’ajouter : "Les apôtres avaient rompu leur union pour suivre le Christ... " Pour le justifier ils citent ce passage des Evangiles : "Nous avons tout quitté pour te suivre" (Mathieu 19,27).

Curieuse façon de traiter et de respecter le mariage. Forcer les apôtres à l’abandon de famille, telle aurait été la volonté du Christ ? Argument sectaire s’il en est, nous ne pouvons souscrire à pareil raisonnement. D’abord parce qu’il faut regarder dans les faits comment les choses se sont déroulées. Et de souligner en premier que Jésus guérit la belle-mère de l’apôtre Pierre dans (Luc 5, 38-39). Cet épisode a non seulement pour mérite d’indiquer clairement que l’apôtre était marié, mais il montre aussi Jésus soutenant et respectant la famille de Simon-Pierre, puisqu’il guérit la mère de son épouse...

Maintenant regardons le Christ lui-même et sa famille, surtout remettons les choses en situation. Lorsque on informe Jésus en train d’enseigner la foule que sa mère et ses frères désirent lui parler celui-ci répond : "Qui est ma mère et qui sont mes frères ? Et montrant ses disciples d’un geste de la main, il ajouta : Voici ma mère et mes frères. Car quiconque fait la volonté de mon Père qui est au cieux, celui-là m’est un frère et une sœur et une mère. " (Mathieu 12, 46-50)

Isolé de son contexte, ce passage de Mathieu donne l’impression d’un Jésus complètement étranger à sa famille. Pourtant, lorsque Marie intervient aux Noces de Cana Jésus ne lui refuse pas le miracle demandé. L’eau est changée en vin, même si pour le Seigneur ce miracle n’aurait jamais dû avoir lieu car "son heure n’était pas encore venue" (Jean 2,4). Si sa famille avait eu si peu d’importance, Jésus aurait-il pris la peine de répondre ainsi à la prière mariale ?

Que Jésus aime sa famille et qu’il ne l’oublie pas, ne l’abandonne pas me semble une évidence. Avant de mourir sur la croix il confie sa mère à Jean et Jean à sa mère. Ses propres frères ne croyaient pas en lui (Jean 7,5). Il ne pouvait à cet instant avoir confiance qu’en l’apôtre Jean, le seul disciple resté fidèle jusqu’au bout, alors que les autres apôtres avaient fui, ou pire encore, trahi ou renié comme Judas et Pierre.

Puis il y eut la résurrection, le pardon accordé à Pierre : "Pierre m’aimes-tu", par trois fois (Jean 21,15-17), pour conjurer le triple reniement ; l’apparition de Jésus ressuscité à l’un de ses frères (1 Corinthiens 15,7), Jacques, "frère du Seigneur" ainsi que le présente l’apôtre Paul dans son épître aux Galates (1,19), celui qui deviendra le premier évêque de Jérusalem.

Jésus n’abandonne pas sa famille, pas plus que ses apôtres. Au contraire, le Seigneur bénit le couple, l’union de l’homme et de la femme revêt pour lui un caractère sacré, la noble institution du mariage est défendue par Jésus dans l’Evangile de Saint Mathieu (19,3-9).

Ce que le Christ demande lorsqu’il déclare : "Nul ne quitte maison, femme, frères, parents, enfants à cause du Royaume de Dieu sans en recevoir la récompense" ; c’est, me semble-t-il, un détachement et une liberté par rapport à l’influence de sa famille, évolution normale de tout être humain qui construit sa propre personnalité, comme l’oiseau qui sort du nid pour prendre son envol. Pas un abandon, pas une démission de ses responsabilités familiales, pas un reniement de sa famille, cela n’aurait pas de sens. Jésus ne peut pas d’un côté bénir et sanctifier le mariage et de l’autre le démolir… Ce serait une incohérence manifeste dans son enseignement.

"La lettre tue, mais l’esprit vivifie" déclare l’apôtre Paul dans sa deuxième épître aux Corinthiens (3,6). Les fondamentalismes en matière de religion peuvent être dangereux, l’expérience de l’Histoire est là pour le montrer.

Quand Jésus déclare : "Si ta main ou ton pied sont pour toi une occasion de péché coupe-les et jette-les loin de toi" ; ou encore : "si ton œil est pour toi une occasion de péché arrache-le et jette-le loin de toi" (Mathieu 18, 8-9) ; cela ne signifie pas qu’il faut agir ainsi... Un peu de bon sens s’il vous plaît ! Certes Jésus a déclaré cela, c’est inscrit dans les Evangiles, mais il y avait un contexte là aussi. Les premiers chrétiens n’ont jamais pris cette phrase au pied de la lettre… Il suffit d’ouvrir sa Bible et de relire le livre des actes des Apôtres pour s’en convaincre, ainsi que les épîtres de Paul. Mais, dans une situation donnée, dans l’emballement d’un sermon, pour provoquer et piquer au vif l’attention, Jésus a pu laisser échapper ces paroles.

Si les apôtres avaient cru bon rompre avec leurs épouses et leurs familles l’apôtre Paul aurait-il écrit : - "Si quelqu’un désire être évêque, il désire une oeuvre excellente. Mais il faut que l’évêque soit irréprochable, mari d’une seule femme, qu’il gouverne bien sa propre famille, élevant convenablement ses enfants, car si quelqu’un ne sait pas conduire sa propre famille, comment pourra-t’il gouverner l’Eglise de Dieu ?" (Epître de Paul à Timothée, chapitre 3, versets 1 à 5).

Et dans la première épître aux Corinthiens: - "N’avons-nous pas le droit de mener avec nous une soeur qui soit notre femme, comme font les autres apôtres, et les frères du Seigneur, et Pierre ?" (1 Corinthiens 9-5)

Voilà de quoi donner à réfléchir à ceux qui veulent à tout prix, et en forçant le sens des Ecritures, imposer le célibat des prêtres. Non, le célibat des prêtres n’est pas une loi divine mais une loi ecclésiastique propre à certaines Eglises. Dans l’histoire de la chrétienté, la montée en puissance du courant monastique et peut-être une notion de péché attachée à la sexualité ont entraîné des positions éloignées de l’esprit des Evangiles et des premiers chrétiens.

Il n’en est pas ainsi au sein de l’Eglise Gallicane qui s’efforce de suivre la voie de l’équilibre et du bon sens.

De l’âge des enfants pour le baptême

Dans la pratique pastorale de nos paroisses, il n’y a pas d’âge limite pour la célébration du baptême des enfants. Pourtant, de plus en plus aujourd’hui, certaines Eglises restreignent l’accès aux sacrements. Cette attitude nous semble dangereuse, trop loin de l’esprit de l’Evangile.

Les sacrements ne sont pas une récompense mais le "médicament de l’âme". Ils ont été institués pour être une aide et un soutien : "Ce ne sont pas ceux qui se portent bien qui ont besoin de médecin, mais les malades. Je ne suis pas venu appeler des justes, mais des pécheurs" déclare Jésus en (Marc 2,17).

L’Eglise n’est pas une société élitiste, elle s’adresse à tous les hommes, et dans ce tout les enfants ne doivent pas être oubliés, pas plus que les vieillards...

Nous faisons nôtre cette maxime attribuée à Saint Vincent de Lérins : "Est catholique ce qui a été cru toujours, partout et par tous".

L’Eglise a toujours baptisé les enfants sans poser de conditions particulières concernant l’âge des petits que l’on portait sur les fonts baptismaux. "C'est des apôtres qu'est venue la coutume de baptiser les petits enfants" déclare Origène au IIIème siècle (Romains Comment. V,9).

L’enfant est porté par la Foi de sa famille, voilà pourquoi l’on baptise les bébés et les petits enfants.

Dans l’Eglise Gallicane, le catéchisme est suivi par les enfants qui se préparent à la première communion, à la communion solennelle et à la confirmation.

En revanche, pour le baptême, vu l’importance essentielle de ce sacrement dans le Mystère du Salut, (c’est à dire qui nous incorpore au Christ et à son Eglise), nous n’imposons pas de condition particulière à la demande de célébration de baptême autre que celle d’avoir la Foi, ou d’être porté par la Foi de sa famille pour les enfants.

Le remariage des divorcés

L’Eglise Gallicane accepte de bénir, dans certains cas, le remariage des divorcés.

Pourquoi certains cas seulement ? Parce que nous sommes contre le divorce, mais les coupables ne sont pas toujours les divorcés...

Il n'est pour nous qu'un seul couple parfait, indissoluble, éternel : c'est le Christ et son Elue, l'Eglise.

Et quand un couple vient nous demander la bénédiction de l'Eglise au oui de son nouvel espoir, en vertu de notre pouvoir de lier et de délier, dans la mesure de la sincérité des coeurs, nous bénissons.

Saint Jérôme conseillait à Fabiola de quitter un mari débauché et de chercher un brave homme pour élever ses enfants.

Notre position est avant tout tolérance et charité. Le Christ a toujours tendu la main à l’être humain, jamais il n’a fermé la porte. On oublie trop souvent que Jésus est le Dieu qui sauve, pas celui qui juge, celui qui rend l’espoir, pas celui qui condamne pour enfermer l’être humain dans une culpabilité sans issue.

Voilà pourquoi nous bénissons.

D’autres Eglises se veulent plus intransigeantes, préférant lier de lourds fardeaux sur les épaules des blessés de la vie. Il est facile pour elles d’agir ainsi, surtout lorsqu’elles ne remuent pas ces fardeaux, elles-mêmes, du petit doigt...

Le caractère indissoluble du mariage invoqué par certains pour refuser toute compréhension relative à une nouvelle union est souvent mis en première ligne. Pourtant, dans cette théologie, il existe toute une batterie d’arguments permettant de faire déclarer "nul" un mariage par un tribunal "d’experts ecclésiastiques". S’il est indissoluble, il l’est dans tous les cas, et ce n’est pas un tribunal ecclésiastique qui peut y changer quoi que ce soit.

Pour l’Eglise Gallicane, c’est l’amour qui maintient la cohésion du mariage, et son indissolubilité. Mais si l’amour est remplacé par la haine ou l’indifférence, que reste-t-il de l’union des êtres ?


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