Dans un précédent article nous vous présentions le livre publié par l'abbé Junqua en 1877, ouvrage au nom évocateur et visionnaire: "L'Eglise Démocratique et Sociale de la Liberté". Nous rappelions également que ce prêtre fut, à Bordeaux, le fer de lance du mouvement de résistance à l'absolutisme du Vatican. Essayons maintenant de comprendre le pourquoi de son procès et l'injustice de sa condamnation.

Scandale à l'Archevêché

Au tout début de l'année 1872 le quotidien "La Tribune de Bordeaux" publiait en première page le commencement d'un feuilleton intitulé: "Les Mystères d'un évêché, scènes de la vie jésuitique contemporaine", par l'abbé X***. Dans son introduction, l'auteur révélait que le personnage principal du feuilleton serait un "archétype des évêques, archevêques, cardinaux ultramontains du dix-neuvième siècle, rejeton des prélats de la cour de Léon X et de Jules II". Le feuilleton se terminerait sur "l'apocalypse soudaine et radieusement funèbre" de ce "parvenu des autels". Dans les numéros suivants l'auteur s'en prenait au dogme, alors récent, de l'infaillibilité pontificale, il dénonçait également le célibat ecclésiastique et les abus de la confession obligatoire. C'est ainsi que "l'archétype" évangélisait sa maîtresse en buvant du champagne, dans la salle aérienne du restaurant Robinson, dans la banlieue de Meaux.

Le bruit fait dans Bordeaux fut évidemment énorme. Qui pouvait bien être le mystérieux abbé X*** ? Un abbé Bonnétat fit savoir par la presse que ce n'était pas lui. Le mystère dura jusqu'en mars. Le 14 de ce mois les quotidiens bordelais révélaient que la police avait perquisitionné le 12 dans le bureau du gérant du journal La Tribune, M. Peychez, 18 rue du Parlement Sainte Catherine; puis au domicile de l'abbé Mouls, 7 rue d'Albret; enfin dans celui de l'abbé Junqua, 11 rue de Vertheuil. Une commission rogatoire avait été signée le 11 mars par M. Jules Calvé, juge d'instruction près le tribunal d'instance de Bordeaux. Le directeur du journal "La Tribune de Bordeaux", les abbés Mouls et Junqua étaient inculpés "d'avoir, en publiant dans le journal La Tribune, au cours de l'année et notamment dans les numéros du 22 février, des 6, 9 et 10 mars, une série de feuilletons ayant pour titre: Les Mystères d'un évêché, scènes de la vie jésuitique, commis des outrages caractéristiques à la morale publique et religieuse, délit prévu et puni par l'article 8 de la loi du 17 mai 1819".

On était encore, dans cette France du XIXème siècle, sous un régime religieux autocratique et arbitraire. Le pouvoir ultramontain, à l'inverse du courant gallican, avait pour lui l'or et la puissance dirigeante. Le cardinal Donnet, archevêque de Bordeaux et sénateur de l'empire, c'était bien lui "l'archétype" et le "parvenu des autels" du feuilleton, nul ne s'y était trompé, surtout pas lui. Il entendait réagir de façon énergique, avec la toute puissance de l'appareil répressif de l'époque. C'était l'époque des Misérables et de Jean Valjean, les puissants faisaient sentir leur force.

Le journal "La Guienne" décrit ainsi la procession de la Fête-Dieu 1872 à Bordeaux:

"Un peloton de dragons ouvrait la marche, puis venaient, selon l'habitude, les écoles des frères, le grand et le petit séminaire, le clergé des diverses paroisses, les chanoines de la primatiale, enfin le dais.

"le cortège, qui avait un kilomètre de développement, était escorté à droite et à gauche par les soldats du 57ème et du 123ème. Leur attitude, tout à la fois respectueuse et décidée, annonçait que la répression ne se serait pas fait attendre, s'il eût pris fantaisie aux communards de troubler cette pieuse manifestation...

"le dais, sous lequel marchait S.E. le cardinal Donnet, était escorté par des gendarmes à la taille élevée, à l'oeil martial, à la fière tenue qui, eux non plus, n'auraient pas reculé devant une sévère répression."

Le cardinal Donnet ne plaisantait pas.

Interdiction de porter la soutane

En réponse à la perquisition du 12 mars l'abbé Junqua fit publier dans je journal "La Tribune" du 17 mars le texte d'une lettre écrite à son archevêque, lettre dans laquelle le dogme de l'infaillibilité pontificale et le syllabus étaient dénoncés et pris à partie. Le lendemain paraissait dans tous les quotidiens bordelais une lettre d'adhésion du chanoine Mouls à la déclaration de l'abbé Junqua: "Je reconnais avec lui que la doctrine qu'elle contient et le blâme qu'elle inflige à l'épiscopat peuvent et doivent servir de point de départ et de but à une réforme du catholicisme, fondée sur le pur Evangile et sur l'enseignement de la primitive Eglise."

Le même jour, dans le journal "La Tribune", l'abbé Junqua publiait un "manifeste au peuple de Bordeaux". Le lendemain il racontait le déroulement de la perquisition policière à son domicile, le 21 il en appelait au clergé de la Gironde.

Le cardinal Donnet ne fut pas long à réagir. Profitant d'une conférence publique donnée rue Rolland à Bordeaux le 23 mars, il enjoignit "MM. Junqua et Mouls" à quitter l'habit ecclésiastique. En application des règles du concordat la notification fut portée aux deux prêtres gallicans le 27 mars 1872 par le commissaire A. Boutarel.

La Polémique atteint l'Hexagone

Le tumulte fait à Bordeaux par toute cette affaire était maintenant connu de toute la France. Le périodique "L'Aquitaine", journal de l'archevêché de Bordeaux développait une littérature cinglante. Il écrivait le 23 mars 1872: "Nous avons donc en France trois prêtres "vieux-catholiques": M. Michaud, ex-neuvième vicaire de la Madeleine à Paris, M. Junqua, ex-sous-dernier vicaire à Saint André de Bordeaux, et M. Mouls, chanoine et ancien courtier électoral du juif Péreire..."

A Paris, Louis Veuillot dans "l'Avenir" tirait à boulets rouges en direction des deux prêtres bordelais et du curé Michaud de Paris: "Ils sont trois, M. Mouls, le chanoine impliqué dans l'affaire des papiers scandaleux, se déclare à son tour. Il adhère à M. Junqua, lequel est son Michaud particulier. Dans le chapitre, qui peut se tenir entre ces bons compères, M. Mouls sera peut-être en état de fournir des idées, mais ce n'est pas lui qui fournira les écritures. MM. Michaud et Junqua, comme on le voit à leurs manifestations, sont incultes, M. Mouls illettré Il est aussi chevalier de la légion d'honneur. Ses relations avec M. Péreire, entrepreneur d'Arcachon quand M. Mouls en était curé, lui ont valu cette croix..."

Face au rouleau compresseur de la médisance et de l'arbitraire que pouvaient Mouls et Junqua ?

Au passage relevons que le journal l'Aquitaine se teintait d'un antisémitisme reflet d'une époque, celle du pape Pie IX, le même qui vient d'être béatifié par le Vatican le 3 septembre 2000. Pie IX qui fit exécuter ses adversaires, qui condamna la liberté religieuse et la démocratie dans le fameux Syllabus (1864), qui fut l'artisan du dogme de l'infaillibilité pontificale lors du concile Vatican 1 en 1870. Quant à Louis Veuillot on se souviendra qu'il aimait aiguiser sa plume contre Victor Hugo, qu'il justifiait la guerre en écrivant dans la presse "qu'importe le nombre des morts puisque les âmes ne meurent pas", qu'il appuyait le dogme de l'infaillibilité pontificale avec les mots suivants: "quand le pape pense, c'est Dieu qui pense".

En voulant porter aujourd'hui un jugement sur cette affaire, on ne doit surtout pas oublier le contexte politique et religieux de l'époque.

Ajoutons encore que le curé Eugène Michaud s'exila en Suisse où il participa à la création de l'Eglise Vieille-Catholique locale. Il fut ensuite nommé doyen de la faculté de théologie de Berne. Et Mgr Gaston Vigué, coadjuteur de Mgr Giraud en 1921 et évêque ayant conféré la prêtrise au futur Mgr Patrick Truchemotte en 1953, fut dans sa jeunesse élève du professeur Eugène Michaud.

Le Procès

L'abbé Junqua ne tint aucun compte de l'interdiction qui lui avait été faite de porter l'habit ecclésiastique. Mouls, d'une nature moins forte, partit en Espagne. Pour avoir refusé de se conformer à la décision du cardinal-archevêque Donnet, l'abbé Junqua fut cité le 15 avril 1872 devant le tribunal correctionnel où il se présenta en soutane et fut condamné à six mois d'emprisonnement avec les attendus suivants:

"Attendu que par décision en date du 27 mars 1872, dénoncée le même jour à l'abbé Junqua, il lui a été enjoint de quitter l'habit ecclésiastique, que cependant il continue à le porter en ville et qu'il en était même revêtu aujourd'hui quand il a comparu devant le tribunal.

"Attendu que cette infraction à décision légalement prise, et qui doit être obéie, constitue le délit prévu et puni par l'article 259 du Code pénal, que cet article est, en effet, général et atteint toute personne qui, lorsqu'elle en a été régulièrement privée, porte un costume reconnu par la loi ou les règlements et spécialement attribué, soit à des citoyens chargés d'un ministère ou service public comme les membres du clergé, etc."

L'avocat de l'abbé Junqua déposa immédiatement une plainte "comme d'abus" contre l'archevêque de Bordeaux. L'appel était suspensif en attendant une nouvelle décision du tribunal.

Mouls et Junqua se retrouvèrent ensuite en Belgique où ils donnèrent des conférences en jetant les bases d'une Eglise nouvelle, "l'Eglise Démocratique et Sociale de la Liberté".

Mais le 7 juin 1872 l'affaire du feuilleton "Les Mystères d'un évêché" devait être appelée devant la cour d'assises de Bordeaux, pas moins... Les assises pour un feuilleton ! Junqua, toujours combatif, se présenta dignement, Mouls resta en Belgique.

Comme témoin, l'abbé Bonnétat, confrère de Junqua à la cathédrale de Bordeaux reconnut avoir été le dénonciateur. Nul ne sait pour combien de deniers. Trente pour Jésus, combien pour l'abbé Junqua ? Le procureur général se lança dans l'analyse du feuilleton, lut divers passages, présenta quelques lettres personnelles saisies chez Mouls et demanda une condamnation.

Le procès dura deux jours, le verdict fut prononcé en séance de nuit... "C'est votre heure et le règne des ténèbres" avait prophétisé Jésus (Luc 22,53). Les abbés Junqua et Mouls étaient condamnés à deux ans de prison et 3000 Frs d'amende, le gérant de "la Tribune" à trois mois de prison et 2000 frs d'amende.

Loin de courber l'échine, le journal La Tribune annonça dans son numéro du 22 juillet la parution prochaine d'un volume de 500 pages, vendu 1 Frs 50: "Le procès de "La Tribune" et de l'abbé Junqua". Des photographies de l'abbé étaient aussi en vente chez M. Aylies, 164 cours Saint Jean: 1 franc la carte ordinaire, 1 franc 50 la carte pour album.

Dans le même numéro, "La Tribune" faisait de la publicité pour "Les amours d'un jésuite (histoire vraie)", par Gustave Graux.

Incarcéré à la suite du procès, l'abbé Junqua fut extrait de la cellule où il accomplissait sa peine de deux ans pour entendre confirmer par la cour d'appel la condamnation à six mois de prison pour port interdit de l'habit ecclésiastique. Mais cette fois, on avait revêtu l'irréductible Junqua d'une redingote.

L'abbé se défend

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Dans son ouvrage "L'Eglise Démocratique et Sociale de la Liberté" publié en 1877, l'abbé Junqua consacre quelques pages à son procès et à sa condamnation en cours d'assises. Nous pensons utile de les reproduire ici. Il y a du souffle dans ses paroles, et beaucoup de dignité.

"Vous n'avez pas oublié, Peuple de la Gironde, ces assises de Bordeaux de 1872, dans lesquelles on mit tout en oeuvre pour découvrir dans ma conduite passée quelque infraction aux bonnes moeurs; et vous vous souvenez qu'on ne trouva rien, absolument rien.

"Je l'ai dit: si quelque fait de cette nature m'était reproché par ma conscience, je ne me sentirais pas le droit de vous adresser la parole, ni aujourd'hui ni jamais.

"Deux lettres furent exhibées contre moi par le ministère public, l'une provenant d'un vicaire général, l'autre provenant d'un curé qui avait été mon successeur. mais ces deux lettres, qui d'ailleurs n'articulaient rien de formel et se bornaient à des généralités, trouvèrent leur explication naturelle dans la haine conçue par leurs auteurs contre ce qu'ils appelaient mon apostasie.

"Elles n'avaient été écrites, en effet, que pendant les quinze derniers jours qui avaient précédé ma comparution devant la cour d'assise, c'est à dire depuis ma déclaration publique à son Eminence le cardinal-archevêque de Bordeaux et depuis tous les bruits qui couraient le monde à l'occasion de mes procès.

"Elles ne ressemblaient donc qu'à ces vengeances dévotes, dont on voit si souvent des exemples, contre les consciences fatiguées de l'esclavage, qui ont fini par lever l'étendard de l'indépendance et de la liberté.

"Cette simple observation suffit pour réfuter les vagues allégations de ces deux lettres, et le cours des débats les réfuta également, puisque l'accusation ne peut faire passer un seul témoin à charge contre moi et fut condamnée à en voir passer un grand nombre qui attestèrent la régularité de ma conduite à toutes les époques de ma vie, depuis mes premières années de ministère et même depuis ma première enfance.

"La calomnie elle-même ne put donc me ternir. Elle fut réduite à me laisser tel que me faisaient et ma conscience et la voix unanime du Peuple." (L'Eglise Démocratique et Sociale de la Liberté - chapitre 2 - Mon Passé, pages 3 et 4)

"Je n'ai rien à dire ici du verdict que le jury crut devoir prononcer contre moi. Je ne saurais y souscrire, mais je le respecte, en me réservant.

"J'aurais pu nier ma participation à l'oeuvre qu'on incriminait, puisque je ne l'avais pas signée. Loin de moi pareils moyens.

"Si je mets parfois à nu certaines âmes, c'est toujours par la mienne que je veux commencer.

"J'avouais noblement, avec une franchise et un courage que n'effraya point la peine qui m'attendait, la vérité complète: j'étais l'auteur, entre autres choses, des vues philosophiques et morales du roman, les Mystères d'un évêché; je le dis.

"Le jury, sur mon aveu, me déclara coupable sans circonstances atténuantes, et la cour me condamna au maximum de la peine légale; elle ne fit, sans doute, en cela, que ce qu'elle avait le pouvoir de faire; mais elle n'en fit pas moins une chose inouïe: celle de ne mettre aucune différence entre mon complice, qui était contumace, et moi, qui bravement comparaissait devant elle.

"Le journal, la Tribune de Bordeaux, qui avait publié l'ouvrage sous la signature mystérieuse X***, et qui en avait pris, par conséquent, la responsabilité, fut condamné, dans la personne de son gérant, à trois mois de prison, et moi, je fus condamné à deux ans, comme le contumace.

"Je n'accuse personne, je le répète; mais pourrais-je empêcher qu'un tel jugement ne crie haut dans le souvenir ?" (L'Eglise Démocratique et Sociale de la Liberté - chapitre 3 - Ma condamnation en cour d'assises, pages 5 et 6)

"Vous n'avez pas oublié, vous n'oublierez jamais, Girondins, ce qui se passa à mon sujet, dans la même année, à propos de l'habit ecclésiastique, qui avait été mon seul habit depuis que j'étais entré dans les ordres.

"Avec mon ami M. Mouls, chanoine de la cathédrale, je reçus, de la part de Mgr le cardinal-archevêque de Bordeaux, par le commissaire de police, M. Boutarel, requis à cette fin par son Eminence, la signification d'une défense de porter cet habit.

"Je formais recours devant le conseil d'Etat, comme d'abus, contre mon archevêque; le conseil d'Etat crut devoir juger contre moi la cause à lui déférée; le tribunal correctionnel, qui avait suspendu l'affaire jusqu'à cette décision, me considéra, dès lors, comme un laïque n'ayant plus le droit de porter la soutane, bien que, si je me fusse présenté pour le mariage, on m'eût toujours considéré comme un prêtre, obligé devant la loi de rester célibataire; et il me condamna à six nouveaux mois d'emprisonnement, en vertu de l'article 259 du code pénal, qui rend passible de cette peine celui qui porte un costume qui ne lui appartient pas. Ce jugement fut confirmé par un arrêt de la cour d'appel. Je me pourvus alors en cassation contre le jugement et contre l'arrêt, et la cour de cassation rejeta mon pourvoi." (L'Eglise Démocratique et Sociale de la Liberté - chapitre 4 - Ma condamnation en cour d'assises, extraits pages 6 et 7)

Epilogue

Alors que l'abbé Junqua supportait les rigueurs et les souffrances du régime carcéral, son ami et confrère Xavier Mouls tentait de survivre exilé en Belgique. D'une nature moins forte que celle de Junqua il conçut de toutes les épreuves qu'il avait traversé un tel chagrin qu'il mourut prématurément, le 5 juillet 1878, à Chapelle-Lez-Hairlaimont, en Hainaut, dans la famille d'un ouvrier tourneur qui l'hébergeait et dont il était l'ami. Il avait, du reste, et durant tout le temps de ses fonctions de curé (et fondateur) de la ville d'Arcachon en Gironde (1854-1869), été l'ami des humbles.

Dans le quartier des Abatilles, près de l'église Saint Louis à Arcachon, une avenue porte le nom de l'abbé Mouls, résultat d'une campagne de réhabilitation de la mémoire de l'abbé par le Président de la Société Historique d'Arcachon M. de Ricaudy en 1920. En effet, après le départ de Mouls de la cure d'Arcachon les autorités ecclésiastiques romaines firent tout pour gommer, jusqu'au souvenir de l'existence de l'abbé dans cette cité. Il avait pourtant contribué à fonder Arcachon, il avait aimé cette ville, il s'était battu pour elle, ce qui lui avait valu la médaille de la légion d'honneur par l'empereur Napoléon III en 1859. Mais son corps ne fut pas inhumé dans sa terre d'Arcachon, et à Chapelle-Lez-Hairlaimont, en Belgique, sa tombe a aujourd'hui disparu.

"Fantine fut donc enterrée dans le coin gratis du cimetière qui est à tous et à personne, et où l'on perd les pauvres. Heureusement Dieu sait où retrouver l'âme". (Victor Hugo - Les Misérables - fin du premier livre).

L'abbé Junqua quant à lui, après avoir purgé sa peine de prison repartit d'abord en Belgique où il se maria. Il revint en France pour publier "l'Eglise Démocratique et Sociale de la Liberté" en 1877.

"Si je sentais une tache dans ma vie, je ne romprais pas aujourd'hui le silence auquel me condamna, il y a quelques années, le jugement des hommes et auquel m'habituèrent trente mois de prison dure." (Début du premier chapitre - page 1)

Il eut semble-t-il peu de soutien dans ce projet de réforme de l'Eglise de son époque. Le régime du concordat ne lui laissait de toute façon pas beaucoup de liberté. C'est ce qu'avait compris les prêtres Hyacinthe Loyson et Eugène Michaud de Paris qui s'exilèrent en Suisse. Hyacinthe Loyson revint en France où il créa une paroisse sous le nom d'Eglise Gallicane à Paris, mais il refusa l'épiscopat qui seul aurait pu permettre le développement d'une Eglise de plus grande envergure. L'abbé Junqua eut-il des contacts avec le Père Hyacinthe Loyson ? Nous ne le savons point. Ce que nous savons par contre c'est qu'il se lança dans l'apostolat auprès des petits et des humbles et fonda la chapelle Saint Jean-Baptiste à Bordeaux. Il mourut dans la misère en 1899. Il n'y a pas de sépulture à son nom, il fut incinéré comme il l'avait demandé.

"Il dort. Quoique le sort fût pour lui bien étrange. Il vivait.
Il mourut quand il n'eut plus son ange.
La chose simplement d'elle-même arriva, comme la nuit se fait lorsque le jour s'en va."
(Victor Hugo - Les Misérables - fin du dernier livre)


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